La guerre - février mars 1458

Le 19 mars 1458 – que la lumière soit !

Farwen a vu la mamé arriver, a reconnu son pas boiteux et ses doigts noueux mais habiles.
Elle a bien failli hurler quand la mamé en question a déchirer sa chemise, visiblement persuadée que son immobilité n’était que simulation et fainéantise.
Et puis elle a vu le regard de la mamé se fixer sur son corps mis à nu, et ne plus exprimer que pitié et décision.
Décision ?
Oui, 5 minutes après, docile et confiante elle mâchouillait des herbes bizarres, pas mauvaises au demeurant.
Et puis elle a senti ses pensées se détacher de ce corps blessé, et la douleur disparaître comme une ombre fuyant le soleil du matin. Elle a regardé la mamé avec un sourire, quand même c’est une magicienne cette mamé, faudra qu’elle en parle à Samuel ! Images floues et tordues, souvenirs, idées, sensations… Farwen se sent bien, et quand la mamé lui tend la main et lui fait signe de se relever, c’est juste avec quelques raideurs mais toujours le sourire aux lèvres que Farwen attrape la main tendue et se relève.
Un bâton pour l’aider à marcher, la buse sur l’épaule – ça il faudra qu’elle le raconte à Doch – et hop, les voilà parties dans le jour qui se lève.

Bon, la marche n’est pas aussi aisée que prévu le champ de bataille étant encombré d’herbes tassées, de tas de boue, de bois et d’armes brisés, et de corps que Farwen ne semble pas vraiment voir.

Elles font quelques centaines de mètres quand soudain une voix leur parvient.

« Aidez moi ! AIDEEEEEZ MOOOI »

La mamé s’arête net, la buse s’envole et revient presque immédiatement, émet quelques sons stridents et repart comme pour les guider vers une petite princesse blonde accroupie sur une masse informe râlant dans la boue.

Le 19 mars 1458 - le jour se lève, le soleil suit

Elle a regardé la dame se relever, la mamé, et lui a tendu un bâton pour l'aider à marcher. Elle s'est rendue compte qu'elle aurait du boulot en rentrant la mamé, à voir les vêtements déchirés et les blessures qu'il lui faudra soigner...

Et puis elle a entendu une toute petite voix, une voix d'enfant, crier

« Aidez moi ! AIDEEEEEZ MOOOI »

Elle s'est arrêtée net, la mamé, et a attendu le retour de la buse partie en éclaireur sans même qu'elle ait eu à le lui demander. hmmmm.... celle là devient précieuse!
La buse revient rapidement, et lui murmure une histoire d'enfant blonde, de sang et de boue.
La mamé s'apprête à changer de direction pour se diriger vers la princesse, incongrue dans un tel spectacle de désolation, quand elle s'arrête net et stoppe la dame qui en trébuche de surprise mais sourit toujours aux anges. c'est bon, les herbes font toujours effet.

Elle a vu l'ombre, l'ennemi, le français se diriger vers l'enfant et la blessée. Elle reste immobile dans le jour qui se lève, espérant que l'autre ne les verra pas. Et c'est l'enfant qui leur sauve probablement la vie en s'enfuyant et entrainant l'autre à sa poursuite.

La mamé les regarde disparaitre, ombre vive et lumineuse échappant au soldat armé.
Une fois sûre que plus rien ne bouge, elle reprend sa progression vers la masse auprès de laquelle la lumière blonde était agenouillée.

Une femme.
Ou du moins ce qu'il en reste, recouverte de sang et da boue.
Une femme qui respire, la mamé voit son manteau comme trembler alors que le vent est - enfin - tombé.
Une femme à soigner.
Elle lâche la dame, la mamé, et s'agenouille, encore - décidément ses genoux ne s'en remettront pas. Elle dégage le corps de la femme et sait très vite que sa survie ne tient qu'à un fil, un souffle, un espoir ténu.
Bon, premier point, endormir la dame, la vraie blessée, pas celle restée debout appuyée sur son bâton et le sourire aux lèvres. Sauf que le mélange pour la mère d'Alex doit être mâché, et là... et puis celle là il faudrait l'endormir. Sauf que pour la porter... la mamé jette un coup d'oeil à la dame debout, oui elle pourrait l'aider, tant que les herbes font effet.
Elle a pris sa décision. Elle prend un bol en bois dans sa besace, les mêmes herbes, mais en plus grande quantité, et malaxe le tout en le mélangeant à... un peu de vin - on fait ce qu'on peut avec ce qu'on a! et puis elle fait gouter ce mélange dans la bouche de la dame couchée, en lui massant un peu la gorge pour la faire déglutir.

Le 19 mars 1458 - on rentre...

Tiens, mais c'est Kylah!
Houla, tu n'as pas l'air bien ma belle....

Farwen a toujours un sourire béat et le regard un peu flou, elle penche un peu la tête sur le côté en parlant à Kylah, qui est bien en peine de lui répondre vu son état.

C'est bon ce que tu bois?

Toujours pas de réponse, Farwen semble ne pas comprendre et jette un oeil en direction de la mamé.
Elle la voit masser la gorge de Kylah, laquelle ne bronche toujours pas.
Décidément, elle doit etre fatiguée!

Et puis la mamé tente de secouer son amie, lui fait signe de se rapprocher.
Docile, elle s'éxécute. La mamé la fait se pencher, lui passe un bras de Kylah autour des épaules, lui demande

t'nez bien

Alors elle agrippe la main de son amie et serre fort. Toujours sous influence des herbes de la mamé, elle ne sent pas ses plaies s'ouvrir unpeu plus, le sang qui coule et se mêle à celui de Kylah.
La mamé prend l'autre bras, et à elles deux elles soulèvent la blessée, Farwen sans trop réaliser et la mamé en espérant ne pas tuer l'amie de la dame en tentant de la sauver.

Pas après pas, trébuchantes mais entêtées, le voilà qui se dirigent vers la ville et la maison de Farwen.. et surtout les onguents herbes et bandages de la mamé.